[ABONNÉ] LA POLICE SCIENTIFIQUE, GRANDE OUBLIÉE DE LA RÉFORME DES RETRAITES
- Le Hub
- 24 janv. 2020
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Les policiers techniques et scientifiques (PTS) sont en grève depuis cinq semaines pour revendiquer leur droit au régime spécial de retraite. Cette spécialité, peu entendue jusqu'ici dans les revendications, est pourtant largement mobilisée.

Le 15 janvier dernier, la PTS a mis en scène de faux crimes lors de sa manifestation parisienne - Stephane de Sakutin / AFP
Cinq semaines de revendication, de blocage de service, de manifestations et d'appels à son ministre de tutelle... La police technique et scientifique (PTS) est en grève, mais parmi toutes les voix qui s'élèvent depuis plus d'un mois, la sienne peine à se faire entendre.
Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a pourtant cédé aux demandes des policiers, qui auront le droit à leur régime spécial de retraite. Manque de chance pour les agents de la PTS : ils ne sont pas concernés par cette annonce, et devront attendre 64 ans pour partir en retraite.
Qui sont les agents de la PTS ?
La police technique et scientifique est composée de policiers dits "sédentaires". Ils ne sont a priori pas amenés à se déplacer et à prendre les même risques que les agents "actifs". Ils sont cependant détachés dans tous les commissariats de France, et travaillent également dans des laboratoires. Depuis cinq semaines, la PTS se mobilise pour faire valoir son droit à un statut adapté à ses conditions réelles de travail.
"J'ai le costume, mais pas le statut qui va avec." Soazig Henrio, agent de la PTS et déléguée syndicale (SNIPAT)
Ces agents représentent 2% de la police nationale, et sont à l'origine de plus de 30% de l'élucidation des enquêtes criminelles sur le territoire.
Comment travaillent les agents de la PTS ?
Si la PTS se mobilise aujourd'hui, c'est avant tout pour faire reconnaître ses réelles conditions de travail. Analyse de scènes de crime sordides ou de contenus pédopornographiques, utilisation de produits toxiques... Les risques liés au métier ne manquent pas.
Contrairement à ce que leur statut actuel laisse à penser, les agents sont mobiles, puisqu'ils sont appelés à venir expertiser une scène de crime toutes les minutes en France. Ils doivent également être disponibles 24h/24h, sept jours sur sept, et ce en plus de leurs 40h30 de travail contractuel. Après une nuit d'expertise, l'agent appelé doit donc retourner à son poste à 8h le matin, et être opérationnel.
Depuis 2010, les agents de la PTS sont munis d'un gilet pare-balle pour aller expertiser les scènes de crime, mais ils n'ont pas l'autorisation d'être armés. Bien souvent pourtant, ils se retrouvent en danger sur leur lieu de travail. "Il arrive que nous soyons envoyés sur des cambriolages avec le risque que les auteurs reviennent pendant notre intervention. Je me suis déjà fait caillassée, et certains collègues se sont fait braquer au fusil à pompe.", s'indigne Soazig Henrio au téléphone.
Pourquoi font-ils grève ?
Un rythme et des conditions de travail propice au burn-out et aux traumatismes psychologiques, qui pousse aujourd'hui les agents à demander un départ à la retraite anticipé.
"Je ne me vois pas me lever trois fois dans la nuit pour aller expertiser des cadavres à 64 ans.", s'inquiète Soazig Henrio
Un régime spécial de retraite à 52 ans comme dans le cas des policiers "actifs" permettrait, selon les syndicats, aux agents de la PTS de se préserver. Selon Laurent Nuñez, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Intérieur, "le corps de la police technique et scientifique est un corps administratif donc ce n’est pas un corps de policiers". Des propos qui passent mal auprès des principaux intéressés, qui affirment d'ailleurs avoir essuyé trois refus à leur proposition de rendez-vous avec Christophe Castaner.

Devenus les stars du petit écran à travers les séries policières, les agents de la PTS peinent pourtant à se faire entendre au sein des cortèges de revendications, et se mobilisent dans les rues comme sur les réseaux sociaux.
Depuis plusieurs mois, la profession s'est emparé de Twitter pour lancer les hashtags #unstatutpourlaPTS et #vismaviedePTS . Facebook a également permis aux agents de créer des groupes où ils racontent leurs expériences traumatisantes au cours de leur activité : un bon moyen d'extérioriser, mais également de sensibiliser le grand public à leurs conditions de travail.
S.D.
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